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Edouard Huchin

mardi 3 septembre 2024

Plume Verte #66 : Les zoonoses aviaires (autres que l’Influenza, salmonellose et campylobacteriose) : actualités et maladies émergentes

Temps de lecture : 3 minutes 20

Introduction

Les zoonoses sont des maladies contagieuses transmissibles d’un animal vertébré à l’homme et vice versa. Cette contamination peut se faire par voie orale, aérienne, cutanée etc. L’échange de pathogènes peut se faire par contact direct de l’animal à l’homme ou indirect par l’intermédiaire d’un vecteur (moustiques, tiques, etc.) ou d’un support inerte (matériel, surface etc).

On considère actuellement que 60 % des pathologies humaines et 75 % des maladies émergentes sont des zoonoses.

Le changement climatique, la raréfaction des points d’eau et les activités humaines (déforestation, etc.) sont responsables de la perte de biodiversité et des mouvements de population d’animaux favorisant l’émergence des zoonoses. Le commerce mondial avec l’introduction de nouvelles espèces potentiellement contaminées est aussi un facteur favorisant.

En dehors du virus de l’influenza aviaire, des salmonelles ou des campylobacters, d’autres pathogènes, peuvent présenter un risque au quotidien dans nos élevages.

Les exemples de zoonoses présentes en élevage :

Le rouget Erysipelothrix rhusiopathiae

Cette pathologie bactérienne induit des formes mortelles chez les volailles (pondeuses, dindes, canards, oies, pintades) ou les porcs qui se soignent très bien une fois diagnostiquées. De nombreuses espèces animales peuvent présenter des signes cliniques (moutons, mammifères marins) ou héberger le germe sans symptômes (poissons, crustacés). Chez l’homme, elle est responsable d’éruptions cutanées pouvant se compliquer exceptionnellement en arthrite et endocardite voire en formes mortelles. Un vaccin commercial et des autovaccins sont disponibles.

La psittacose Chlamydia psittaci

Cette pathologie bactérienne n’a que très peu d’effet clinique sur les volailles. Cependant les plumes et les déjections contaminées peuvent être source de contamination pour les humains qui vont présenter de la fièvre et des symptômes respiratoires. Une fois prise en charge, cette pathologie se soigne favorablement avec un traitement antibiotique approprié. Cependant, si elle n'est pas prise en charge, la létalité est de 20%.

Le staphylocoque doré multirésistant Staphylococcus aureus

Cette bactérie portée par certaines volailles présente un risque pour les personnes immunodéprimées lors de la manipulation des oiseaux. En cas d’effraction cutanée, elle peut mener à des abcès et des infections de la peau. Le staphylocoque doré a parfois la particularité d’être peu sensible aux antibiotiques (antibiorésistant) et donc difficilement soignable.

Des exemples de zoonoses émergentes :

Le virus du West Nile

Les oiseaux sauvages sont porteurs de ce virus et la contamination entre congénères se fait par voie vectorisée via le moustique Culex. Ce virus peut, de manière accidentelle, contaminer les humains et les chevaux. Des cas ont été diagnostiqués en Gironde en 2022 et 2023. Chez les humains, 80 % des contaminés ne présentent pas de symptôme, mais des cas rares de complications neurologiques sont rapportés. Les volailles d’élevages sont réceptives à ce virus, mais ne permettraient pas sa propagation. Il n'y aurait donc pas de risques à contracter cette maladie via les volailles d'élevages.

Le virus de l’encéphalite japonaise

Ce virus n’est pas encore présent en Europe. Il contamine les oiseaux sauvages via le moustique de type Culex. Très présent en Asie, il peut parfois toucher les oiseaux d’élevages et les humains (jusqu’à 20 000 décès humains par an en Asie). La promiscuité de la population avec les volailles d’élevages, d’autant plus à risque que les volailles sont jeunes, et un environnement humide seraient des facteurs favorisants.

Les zoonoses liées à l’élevage (hors zoonoses aviaires) :

En dehors des zoonoses aviaires, le système d’élevage présente aussi d’autres risques zoonotiques liés à l’environnement :

  • Importation de nuisibles (rats, souris, etc.) via les intrants comme la paille ou les voitures du technicien ou du vétérinaire (mouches) ;
  • Hébergement de nuisible dans le bâtiment : rats, mouches, ténébrions ;
  • Hébergement de tiques sur les parcours enherbés ;
  • Multiplication des moustiques et présence d’oiseaux sauvages proches des points d’eau.

Les nuisibles et oiseaux sauvages sont porteurs de zoonoses (liste non exhaustive) :

  • Mouches : salmonelles, influenza aviaire
  • Rats : leptospirose,
  • Oiseaux sauvages : Virus West Nile, influenza aviaire
  • Tiques : maladie de Lyme, fièvre Q, fièvre Crimée Congo

L’environnement de l’élevage est donc à prendre en considération.

Les règles de base pour protéger :

L’élevage 

  • Biosécurité du site
  • Entretien des prairies
  • Éviter les points d’eau extérieurs hors pipettes (points d’eau artificiels et naturels)
  • Éviter l’alimentation à l’extérieur
  • Gestion des nuisibles et de l’avifaune
  • Hygiénisation des effluents
EPI

Les éleveurs

  • Port d’une tenue de travail propre et régulièrement nettoyée
  • Port de gants régulièrement changés
  • Port d’un masque lors de manipulation des volailles
  • Pharmacie avec trousse de premiers soins à proximité
  • Consultation chez le médecin en cas de symptômes en prévenant que vous êtes éleveurs de volailles.

Les animaux

  • Traitements ciblés
  • Alternative aux antibiotiques
  • Vaccinations

Conclusion :

Les zoonoses représentent un risque pour les personnes au contact des volailles qui ne doit pas être sous-estimé. Il faut rester vigilant à l’apparition de nouvelles pathologies, maladies dites "émergentes", qui peuvent être zoonotiques ou spécifiques aux volailles.

La surveillance accrue, les règles de biosécurité et le port d’équipement de protection adapté restent les meilleurs moyens de s’en prévenir.

Article rédigé par Edouard Huchin, DMV Groupe ANIBIO.

Edouard Huchin

Diplômé de l'Ecole Vétérinaire de Toulouse en 2008, Edouard Huchin exerce depuis 2016 au sein du Groupe ANIBIO, sur le site d'Ussac, dont il est également associé.

Vétérinaire spécialisé en productions aviaires et veaux de boucherie, il porte un intérêt à la protection animale, la sécurité alimentaire et au One Health.

Il possède également une expertise à l'international, notamment dans le développement de la filière viande au Tchad, ainsi que dans l'évaluation des pratiques d’agriculture régéneratrice en filière bovine en France, Australie et USA.

Ce sujet a fait l'objet d'une intervention lors des RIPPA qui se sont déroulées les 4 et 6 juin 2024 à La Baule et Agen.

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